Stop au vieillissement, parlons de longévité !

par Alexandre Faure – Sweet Home

Il reste moins de dix ans avant que la France soit confronté au choc démographique majeur que les médias qualifient de tsunami démographique ou de vague grise. En l’espace de huit ans, de 2022 à 2030, la population des plus de 75 ans augmentera de manière très significative. Selon les projections de population de l’Insee, si les tendances démographiques observées jusqu’ici se maintiennent, la France comptera 76,5 millions d’habitants au 1er janvier 2070. D’après ce scénario central, la quasi-totalité de la hausse de la population d’ici 2070 concernerait les personnes âgées de 65 ans ou plus. L’augmentation serait particulièrement forte pour les personnes de 75 ans ou plus. 

Qu’est-ce que cela signifie ? 

Cela signifie que l’augmentation de la population française ne sera plus dûe à la natalité mais à la longévité. Nous vivons de plus en plus longtemps et donc, la population se maintient au lieu de disparaître. Ce qui est une bonne nouvelle, n’est-ce pas ?

C’est une bonne nouvelle pour les optimistes qui considèrent que vivre plus longtemps est une bonne chose. Mais il n’est pas donné à tout le monde d’être optimiste. Il faut, pour l’accepter, combattre l’image négative que l’on se fait de l’âge, du vieillissement et même, il faut bien l’avouer, de la retraite. Les grèves qui paralysent le pays cette semaine ne viendront pas le démentir ! 

Pour beaucoup de mes concitoyens, le vieillissement est toujours perçu comme quelque chose de peu souhaitable et dont on ne parle que de manière pessimiste. 

Car, comme l’explique le sociologue Vincent Caradec : “ Les individus associent souvent la vieillesse à la faiblesse, à la perte de ressources et à des risques accrus d’attraper des maladies infectieuses – tout cela augmente la stigmatisation. ”

 

Mais il y a de plus en plus de vieux, non ? 

Pourtant, l’amélioration des conditions de vie qui contribue à l’augmentation de l’espérance de vie a également un effet sur le ressenti de l’âge. Bénéficiant d’une meilleur santé et d’une espérance de vie plus grande, le sexagénaire d’aujourd’hui est bien différent de celui du dix huitième siècle et même de celui des années 1950.

Si l’on s’en tient à l’âge chronologique (la différence entre l’année en cours et votre année de naissance), la population âgée augmente et va continuer à augmenter. En revanche, si l’on tient compte de l’âge biologique (c’est à dire une mesure faite selon l’état de santé de la personne), les résultats sont bien différents. 

Si l’on mesure l’âge biologique et non pas l’âge chronologique, entre 1825 et 1985, l’âge d’entrée dans la vieillesse a reculé de 13 ans pour les femmes et de 6 ans pour les hommes. La part des « personnes âgées » dans la population totale n’est pas plus importante aujourd’hui qu’au début du dix neuvième siècle.

Pour Patrice Bourdelais, c’est la preuve qu’il n’y a pas eu de vieillissement de la population et qu’il faut donc en finir avec la notion de « vieillissement démographique » qui, chargée d’une représentation fixiste et négative de la vieillesse, a contribué à « la lenteur de la prise de conscience du changement récent de la réalité de l’âge de la vieillesse. »

Arrêtez de parler de vieillesse, parlez plutôt de longévité

C’est également la conviction de Nicolas Menet. Le directeur général de Silver Valley a publié cette année deux ouvrages qui font l’apologie de la longévité. 

Le grand livre de la longévité, paru chez Eyrolles en novembre 2019 est un guide pratique à l’usage du grand public. Écrit collectivement par douze experts de la longévité, ce livre aborde des sujets aussi divers que la posture, les successions, la sexualité des seniors, l’adaptation de l’habitat, la santé, les aidants ou le harcèlement numérique. 

Cette approche novatrice de la longévité a marqué des points pendant le dernier salon Silver Expo. Nous y avons donné une conférence publique pour présenter notre approche et les réactions du publics ont été rien moins que enthousiastes. 

 

Enfin, on parle de la longévité pour la mettre en valeur. Enfin on ose aborder franchement des sujets qui sont d’habitude évoqués du bout des lèvres. Cet accueil public positif nous fait présager un beau succès éditorial. 

Vous souhaitez découvrir l’ouvrage ? Rendez-vous sur Sweet Home pour en télécharger un extrait

Prenant le contrepied d’une approche pessimiste du vieillissement, le Grand Livre de la Longévité invite à un changement de logiciel. On parle toujours de la même chose, mais sous un angle différent. C’est également la thèse défendue par l’auteur dans l’essai “Construire la société de la longévité” qu’il a publié en mai 2019, toujours chez Eyrolles. 

 

Nicolas Menet y écrit : “Les “vieux” dérangent à plus d’un titre, d’abord parce que porteurs des stigmates de la vieillesse, ils constituent une personnification trop évidente de la mort, ensuite parce que cloisonnés dans des identités artificielles, ils manifestent le désir d’en sortir pour continuer à être eux-mêmes et enfin parce qu’ils obligent la société à la solidarité du fait de leur potentielle dépendance dans le grand âge.”

 

La dernière Silver Expo a été l’occasion de tester le concept de longévité en public pour en valider l’intérêt et la portée. Mais cet événement annuel de la Silver économie a également été le théâtre d’une autre révélation en faveur de la longévité : la victoire de la startup Cokpit à la Silver Academy, le concours de startup organisé dans le cadre du salon. 

 

 Pourquoi la victoire de Cokpit est un signe fort en faveur de la longévité

Cokpit est une jeune startup créée par deux entrepreneuses : Laetitia de Roquemaurel et Camille Maillard. Avec Cokpit, elles veulent repenser le travail des seniors en aidant ces derniers à trouver des missions à forte valeur ajoutée dans des entreprises partenaires. 

La structure a remporté haut la main la finale de la Silver Academy devant les trois autres finalistes : Manea, Happy Visio et Part’Ages. 

Voici comment s’est déroulé le concours : 

 

  1. Les candidats ont d’abord dû faire acte de candidature en réalisant une vidéo de présentation inédite. 
  2. Ils ont été évalués par le public à partir de ces vidéos. Les six candidats ayant recueilli le plus de votes sont allés en demi-finale.
  3. Le jury de l’événement, composé de Laurent Levasseur (Bluelinea), Gérard Rivière (CNAV), Sébastien Podevyn (France Silver Eco) et François Chambeyron (UGAP) a procédé à un premier choix, sur dossier, pour ne retenir que les 4 propositions les plus pertinentes.
  4. Les 4 finalistes ont ensuite défendu leur projet en public, le 27 novembre 2019. Après un pitch chronométré de 1mn30, ils ont répondu aux questions du jury. 
  5. Pour chaque candidat, le jury a noté la prestation selon six critères :
  • Fiabilité et clarté de la présentation
  • Capacité à montrer l’intérêt réel de l’innovation pour le public visé (personnes âgées de 60 ans et plus). 
  • Capacité à montrer le caractère innovant du produit ou service
  • Capacité à montrer le potentiel économique de l’innovation
  • Capacité des équipes à mettre en œuvre le projet (compétence, dimensionnement…)
  • Appréciation générale

 

La victoire de Cokpit est une bonne nouvelle pour plusieurs raisons :

  1. Parce que la startup veut apporter une réponse à deux problèmes réels et sérieux : l’emploi et le revenu des seniors. L’autonomie financière, c’est aussi l’autonomie !
  2. Parce que ce projet s’adresse aux jeunes seniors, ce qui rappelle que la Silver Économie, ce n’est pas uniquement les produits et services à destination des seniors très âgés et dépendants.
  3. Parce que les deux co-fondatrices sont des femmes, ce qui apporte de la fraîcheur dans un écosystème très masculin.

 

Voici un projet qui s’inscrit totalement dans mon propos : il contribue à faire changer le regard que porte la société sur les personnes âgées en leur donnant un rôle actif et valorisant. 

 

A propos de l’auteur : 

Alexandre Faure est blogueur et consultant spécialisé en Silver Économie. Convaincu que l’allongement de l’espérance de vie est un atout, il veut aider les organismes et les citoyens à en prendre la mesure. Alexandre Faure a fondé Sweet Home, un média dédié à la Silver Économie.

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